750 grammes
Tous nos blogs cuisine Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
La Pipette aux quatre vins
La Pipette aux quatre vins
Publicité
Newsletter
Pages
Derniers commentaires
Archives
La Pipette aux quatre vins
Visiteurs
Depuis la création 1 096 675
12 juillet 2012

Thierry Valette, au Clos Puy Arnaud : Castillon à son meilleur

Voilà quelques temps, les vins issus de communes satellites de St Émilion étaient souvent considérés avec une grande part de condescendance, que ce soit par le négoce, les journalistes spécialisés ou les amateurs. Pour beaucoup, ils ne pouvaient être au niveau des plus grands et devaient fleurir dans les rayons de la grande distribution, souvent adepte du moins disant pécuniaire. La spéculation du nouveau millénaire aidant, le phénomène se trouva amplifié, mais nombre de crus devenant rares et dispendieux, certains domaines de Montagne, Castillon, Lussac, Puisseguin et Côtes de Francs ont pu prétendre intégrer une sorte de "deuxième division", dans laquelle on joue serré et où, parfois, la qualité et l'exigence permettent de rivaliser avec les supposés meilleurs.

014

Écarté de St Émilion lors de la publication du premier classement dans les années 50, Clos Puy Arnaud, déjà cité en 1874 dans l'incontournable Ferret (les bâtiments datant du milieu du XIXè), avait déjà vu sa notoriété ancienne remise en cause au milieu des années 30, quand apparut le classement des Crus Bourgeois du Médoc. A cette époque, en effet, pas moins d'une trentaine de ces Crus Bourgeois existaient en Castillon et Francs, mais il leur fut interdit d'utiliser cette mention, exclusivement réservée alors au Médoc et... au Blayais, où se trouvaient quelques propriétés appartenant aux Médocains. La duplicité, dans le monde des affaires, ne date pas d'aujourd'hui!...

Thierry Valette devait avoir une vie toute tracée, puisque sa famille est dans le monde du vin depuis quatre générations. Mais, il tente tout d'abord une carrière artistique (option danse moderne et jazz), avant de se tourner vers ce que le giron familial développait depuis nombre d'années.

La famille de négociants de St Ouen (dans le 9-3, aurait-il été rappeur ou adepte de hip-hop quelques années plus tard?...) dont il est issu, s'est élevée petit à petit dans la hiérarchie des vins, passant de la diffusion de flacons étoilés bas de gamme aux grands crus dans les étoiles. Au passage, l'activité de "vins fins", créée au fil du temps sous forme de petites caves parisiennes, fut vendue pour devenir les Caves Nicolas. De la même façon, les petits libres-services apparus dans les quartiers de la capitale et revendus eux aussi, devinrent les Felix Potin bien connus. Dans un même temps, grand-père et père de Thierry Valette font l'acquisition de vignes en Loire, Languedoc, Bordelais et Afrique du Nord (avec quelques associés locaux). Ils finissent par se recentrer sur Bordeaux et St Émilion, en achetant Pavie et Troplong-Mondot. C'est ce qu'on appelle sans doute avoir du nez!...

005   001   003

Si ces propriétés ont changé de modèle de gestion depuis deux décennies, elles n'ont satisfait qu'à un équilibre précaire entre 1960 et 1980. Pavie est vendu en 1998 à Gérard Perse, ex-propriétaire de super et hypermarchés, déjà acheteur de Monbousquet en 1993, au moment où Thierry Valette se forme au contact de quelques personnalités du vignoble local : Jean-Paul Valette, François Mitjaville, Peter Sichel, Maryse Barre, puis Stéphane Derenoncourt et Anne Calderoni, pour une approche plus fouillée de la biodynamie.

Thierry Valette s'installe à Belvès de Castillon et au Clos Puy Arnaud en avril 2000. Aux alentours, sept hectares sur le plateau calcaire à astéries, à une altitude de 95 m environ (soit au même niveau que Troplong-Mondot, Pavie-Macquin et le haut de Pavie), penchant légèrement vers l'ouest et le nord, doté d'une aérologie tout à fait bénéfique. Peu de terre (pas plus de 20 à 30 cm) avant d'atteindre la roche mère, parfois quelques graves. Deux autres spots complètent les douze hectares du domaine : 1,5 ha à 500 mètres de cet îlot principal, légèrement orienté nord, mais sur le plateau également, puis 2,7 ha à St Genès de Castillon (à 2 km), dont 1 ha sur le même plateau et 1,7 ha sur la pente d'un coteau orienté sud, associant de haut en bas, tuf, argile et molasses parfois profondes. Ces dernières parcelles sont en principes destinées au second vin, alors de le grand vin provient à 90% du plateau.

004   007   008

A ce jour, le merlot est largement majoritaire, puisque représentant les deux tiers de l'encépagement. Pour le troisième tiers, les deux cabernet, dont 90% de cabernet franc. Après un peu plus de dix ans consacrés à la mise en valeur du cru, ainsi qu'à la confirmation de sa notoriété, le vigneron de Clos Puy Arnaud ne reste pas pour autant les deux pieds dans le même sabot. Les réflexions en vigueur dans le vignoble régional, les observations faites par les uns et les autres aboutissent à la question suivante : à Bordeaux, le merlot ne flirterait-il pas avec sa limite sud?... Certains grands crus ont pris l'option d'anticiper avant même de connaître la réponse et remplacent le merlot sur les côtes sud par du cabernet franc, y compris à Pomerol!... Au domaine, Thierry Valette a mis sur pieds un programme de replantation, qui augmentera la proportion de cabernet franc d'ici deux ou trois ans, mais aussi de petit verdot, comme sur ce petit clos d'une cinquantaine d'ares entouré d'arbres et exposé plein sud.

Attentif aux informations qui circulent dans le vignoble, Thierry Valette n'en est pas moins circonspect quant au manque de "vision à la Bourguignonne" de certains de ses congénères, notamment les propriétaires de Grands Crus Classés, plus enclins à former des équipes laborieuses et à les associer aux avis d'un flying-winemaker-conseil à la mode. En parcourant le vignoble en sa compagnie, il va de soi qu'il n'en est pas de même ici. Attention constante pour l'état de la vigne, recherche d'une bonne harmonie avec la nature environnante, rien de très exceptionnel, mais loin d'être une généralité dans la région.

013   010   012

En plus d'une certaine remise en cause des orientations passées, le vigneron se méfie aussi des certitudes que d'aucuns clament parfois, oubliant l'éphémérité de leur expérience. Ainsi, une grosse inquiétude est apparue dans le vignoble à la sortie de l'hiver dernier, la saison étant particulièrement sèche. Pourtant, en avril, 140 mm de pluie abreuvèrent les sols. Depuis, les jours se suivent avec de gros écarts de température et la grosse sortie de végétation, suite au temps sec, a été bien réduite par une coulure conséquente. Des rendements moindres, mais des économies substantielles, du fait de la non-nécessité des vendanges en vert cette année. Néanmoins, la situation phytosanitaire bien contrôlée jusqu'à la mi-juin, se complique désormais, avec l'apparition de foyers de mildiou, y compris sur grappe. Thierry Valette ne baissera pas la garde et restera sur le qui-vive, surtout avec le souvenir de 2007, où il perdit 60% de sa récolte!... Membre de Biodyvin et de Renaissance des Appellations, il entend bien les débats actuels sur l'utilisation du cuivre, mais craint que certains bios ne fassent fausse route bien imprudemment. Dans un même ordre d'idée, que penser des effeuillages en cours chez certains GCC, alors que la veille de notre visite, il ne faisait pas moins de 38° en plein soleil?!... Comptez sur le vigneron de Puy Arnaud pour rester les pieds sur terre!...

019   017   018

Très intéressante dégustation au chai, en compagnie notamment de Nicolas Cosse, maître de chai, croisé lors de Biodyvin 2011, qui propose, en guise de mise en bouche, un trio d'échantillons dont le meilleur servira de base au second vin du domaine.

A suivre, plusieurs échantillons du millésime 2011, prélevés sur des barriques de différentes origines, cépage par cépage. Tous les lots n'en sont pas au même stade et la prise de bois ne les affecte pas de la même façon. On comprend mieux ainsi, à quel point il faut être patient pour construire le grand vin de chaque millésime. D'autant que parfois, la nature s'en mêle. Ainsi avec 2010, les fermentations malolactiques, traditionnellement tardives au domaine, se sont étirées jusqu'en novembre 2011!... Pas vraiment idéal pour bien figurer au moment de la sacro-sainte cérémonie des Primeurs, en avril, "devenue un rendez-vous financiaro-mondain", selon le vigneron, qui apprécie cependant d'entendre Robert Parker souligner qu'il note mieux Clos Puy Arnaud après la mise, que lors du grand tasting printanier. Pour ce qui est des amateurs, gageons que ce cru mérite de sortir de son orbite satellitaire et regagner la terre de nos sous-sols et de nos caves, pour une évolution qui s'annonce des plus passionnantes.

Publicité
Publicité
Commentaires
R
Clos puy-Arnaud est un excellent choix ;<br /> <br /> pas de mauvaise surprise. Et quelques grandes années (2005,2008,2009,2010)<br /> <br /> Un très bon rapport qualité prix.<br /> <br /> Une approche sérieuse de la Biodynamie.
Répondre
Publicité