Vendée : vignobles avec vue sur mer, ou presque!...
De belles journées d'octobre ou de début novembre (l'été indien s'étire de plus en plus dans nos contrées de la bordure atlantique), qui dit mieux pour aller faire un tour dans le vignoble vendéen?... Largement inspirées par la série d'articles parue dans Le Figaro au cours de l'été dernier (Vignobles avec vue sur mer, du 23 au 29 juillet), ces trois escapades successives permettaient également de faire un petit tour d'horizon, plutôt maritime, de domaines nouveaux ou peu connus, parmi les Fiefs Vendéens. Voilà quelques années, lorsque les Fiefs atteignaient le graal de l'AOC, j'avais évoqué ici-même quelques vignerons ayant opté pour une viticulture bio, sachant qu'il ne fallait pas, cependant, laisser entendre que ce choix était général dans le département. Malgré tout, ne faignant pas cependant d'ignorer les difficultés de certains, j'avais alors estimé que le vignoble vendéen pouvait globalement - à moyen terme - prendre cette orientation, pour peu que quelques volontés sortent du bois et que quelques immobilismes soient collectivement combattus. Mais, de toute évidence, l'agriculture biologique ne se décrète pas, du jour au lendemain, au sein de quelque instance, fut-elle limitée à une petite vingtaine de composantes et autant de domaines, baisse des effectifs en cours, comme le montre la situation à Brem sur Mer, où l'on est passé de onze à six propriétés en à peine autant d'années. Enfin, si la proportion d'hectares de vignes en bio augmente en Vendée, on ne peut croire encore à une généralisation, même si les locomotives (Michon, Mourat, Chabirand...) sont désormais bien installées dans cette option et ont fait la preuve des qualités de ce choix exigent. Ces arbres sont de bonne taille, la forêt est de plus en plus réduite, mais en découvrant ces trois "nouveaux" domaines, il sera aisé de constater que, parfois, certaines obligations, ou que diverses préoccupations, prédominent encore et sans doute, pour de nombreuses années. Il s'agit ici de trois hommes de la même génération, aux parcours très différents, qui savent qu'inverser la méthode n'est pas simple, même s'ils essaient de se projeter sereinement dans leur avenir, pour que l'aventure mérite le détour, en espérant que Dame Nature ne les pénalise pas trop.
~ Thomas Dormegnies, à Jard sur Mer ~
Jard sur Mer n'est pas une des communes de l'aire d'appellation de 490 hectares des Fiefs Vendéens, malgré la proximité de Talmont-Saint-Hilaire, qui fait partie du secteur côtier, ou fief, de Brem sur Mer. Aimable bourgade balnéaire, voisine également de Saint Vincent sur Jard, où se situait la maison de vacances de Georges Clemenceau, Jard est surtout connue pour ses plages, son petit port de plaisance et, lorsqu'on tourne le dos à la mer, ses terres de grandes cultures.
Le vigneron de Jard, Talmondais d'origine, a un vécu, côté vignes, des plus solides. En effet, il fut pendant quinze ans ingénieur en recherche génétique, travaillant sur les sélections massales, au sein des Pépinières Mercier, à Vix, dans le Sud Vendée. Un parcours qui a bétonné sa connaissance des cépages, parfois même des plus exotiques, avec notamment des interventions régulières en Arménie, auprès de quelques propriétaires du pays, ayant grandement investi pour un renouveau du vignoble des montagnes arméniennes. Même s'il a désormais opté pour une activité principale de conseil, en free lance, auprès de domaines français et étrangers, il reste attaché à ce pays et y intervient toujours, plusieurs fois par an. Gardant quelques clients, il s'est depuis rapproché de Lilian Bérillon, pépiniériste bien connu installé dans le Vaucluse, qui essaiment désormais dans tous les vignobles.
Au cours de l'année 2015, il apprend qu'un coteau de 4,70 ha, exploité par un pépiniériste nantais, cherche preneur. Depuis plusieurs années, les interventions y étaient très limitées, des équipes descendant de Loire-Atlantique ponctuellement pour la taille ou les différents travaux en vigne, la vendange étant vendue en moût au négoce local. Aucune bouteille n'était produite sur place, on y trouvait donc ni vin, ni matériel. Pourtant, si on en croit le cadastre, on peut penser que ce petit coteau, entre le marais et la plaine céréalière, était naguère partagé en bandes de terrain, sur lesquelles la vigne plantée permettait de produire un vin de consommation courante et familiale à nombre de petits propriétaires.
Pourtant, cette rupture de pente est caillouteuse à souhait, puisqu'on y trouve des calcaires à silex, cet espace se situant à la croisée du Massif Armoricain et du Bassin Charentais. Une lentille de terre, comme une lèvre, peu courante dans le secteur. Celle-ci est exclusivement plantée de chardonnay d'une vingtaine d'années, dont une bonne proportion est encore vendue, par le négoce, en IGP Val de Loire et les bois récupérés par le pépiniériste. Cette parcelle est d'ores et déjà complétée par une plantation voisine de pinot noir, sur 1,10 ha, plus une autre d'un hectare, actuellement en friche, sur laquelle une sélection de pinot d'Aunis et de petit verdot (cépage bien connu du vigneron) devrait apparaître dans le futur, afin d'apporter un forme d'originalité dans l'offre locale. Cette parcelle, conduite en viticulture conventionnelle pendant de nombreuses années, doit connaître une transition indispensable et elle est désormais enherbée, la pousse de l'herbe étant maîtrisée par des tontes ponctuelles.
Limité, pour l'instant, à cette seule parcelle de chardonnay en production, Thomas Dormegnies a opté pour l'achat de raisins, afin de produire quelques quantités de vin rouge et de rosé. Pour cela, il s'est tourné vers Éric Sage, nouvellement installé à Brem sur Mer, ce dernier disposant de jolies parcelles (et de quelques volumes), comme nous le verrons ci-après. Au total, les fruits d'environ 1,50 ha de gamay et de pinot noir.
Si l'installation est des plus rudimentaires, le vigneron ne jette pas cependant le manche après la cognée. Même si les vins ne sont pas construits pour être des vins de longue garde, la vendange est manipulée au moyen de bastes et d'un élévateur, pour éviter le plus possible l'action des pompes, dans une tentative de travail par gravité. Les vinifications sont pratiquées avec le froid et sous gaz inerte.
Jusqu'à maintenant, pour tenter d'asseoir la commercialisation de ses vins, Thomas Dormegnies a opté pour deux aspects importants à ses yeux : des étiquettes très sobres, ne mentionnant que le nom des cépages (Chardonnay, Pinot noir, Gamay-Pinot noir pour le rosé et Chardonnay encore pour le pétillant), à charge pour lui d'évoquer avec ses clients le potentiel de ceux-ci, notamment à travers ce qu'ils sont sensé exprimer et, d'autre part, la recherche d'une vente locale, sur le marché de Talmont-Saint Hilaire, avec également les ostréiculteurs de la Guittière, plus quelques restaurants, du fait de l'activité saisonnière.
Certes, il ne repousserait pas l'idée de dénicher quelques clients dans la restauration nantaise ou rochelaise, mais il doit trouver quelques créneaux afin de démarcher les quelques bonnes tables de ces deux villes, au regard de ses autres activités. La prudence est donc de mise, afin surtout de déterminer ce que pourrait être le volume moyen annuel de bouteilles permettant de satisfaire une demande, en évitant de gonfler les stocks entreposés dans des locaux agricoles basiques. Quelques années donc, pour trouver l'équilibre, avant de proposer une gamme qui pourrait être plus originale à l'avenir et pour les amateurs, de découvrir des cuvées franches et sincères, comme celles de ce millésime 2016. A suivre, avec 2017, au printemps prochain!...
~ Éric Sage, à Brem sur Mer ~
Encore une arrivée récente dans le vignoble vendéen, puisqu'elle remonte au printemps 2016. Éric Sage est cependant vendéen d'origine, d'un petit village entre pleine et bocage, St Juire Champgillon. Il a même fait ses études à La Roche sur Yon, puis à Briacé, au coeur du vignoble nantais, pour obtenir un BTS Viticulture-Oenologie. Ces dernières années d'études restent, selon lui, une véritable révélation : il sera vigneron!...
Pour renforcer son expérience, Éric Sage met le cap sur le Loir-et-Cher et devient régisseur de domaines, à Oisly, puis du côté de Sancerre. Plus tard, il monte un bar à vins à Blois, expérience qui l'ouvre véritablement et définitivement à la grande diversité des vins. Les années passant, il retrouve l'envie de produire et se met en quête d'un "grand terroir". Presque par surprise, il se tourne vers les Fiefs Vendéens, en apprenant que la famille Roux, à Brem sur Mer, cède ses quinze hectares. De plus, avec son épouse Petra, hollandaise d'origine, la proximité de la mer et l'idée de se colleter à un vignoble maritime contribuent à renforcer leur envie d'ailleurs. Pourquoi pas la Vendée?...
Quinze hectares, de prime abord, c'est beaucoup pour un seul homme!... D'autant que, certaines parcelles conduites en viticulture conventionnelle, sont quelque peu fatiguées. Mais, quelques-unes sont situées sur des terroirs d'exception, qui plus est divers : schiste, argilo-calcaire, quartz, rhyolite... De plus, le domaine compte plus de trois hectares et demi de très vieilles vignes de chenin et de négrette, mais celles-ci n'étant pas mécanisables, elles méritent désormais une attention particulière, dans le cadre d'une conversion en agriculture biologique intégrale, entamée dès les premiers mois.
En découvrant notamment le secteur dit des Garennes, on imagine aisément que faire appel au cheval pour les travaux d'automne, est sans doute la meilleure solution. Cette option a quelque chose de naturelle pour celui qui fut naguère, si l'on en croit l'article de Claire Giovaninetti, paru dans Ouest-France en septembre dernier, dès son enfance, un cavalier de concours hippique, au point qu'il collectionna dès l'âge de douze ans, de nombreuses bouteilles gagnées lors des épreuves et entreposées dans la cave familiale. Désormais, il possède lui-même un trait mulassier poitevin (race classée en voie de disparition) et fait appel à son ami Baptiste Vivinus, installé à Pouillé, dans le Sud-Vendée, qui partage avec lui une passion pour cette espèce rare, parmi les plus adaptées aux travaux de la vigne.
Cette période de conversion a de nombreuses exigences, avec notamment la nécessité de trouver, par exemple, un outillage adapté pour désherber sous le rang, mais aussi revenir à une taille moins couleur locale (la taille en tête de saule n'étant pas rare dans la région) permettant d'entretenir la vigne au mieux. De plus, afin de profiter d'un biotope quasi idéal (friches et bois de pins entourant souvent les parcelles), une approche biodynamique est probable dans les prochaines années, méthode qui permet, selon le vigneron, "d'obtenir des vins avec du fond et une âme." En attendant, il faut faire face à une inévitable baisse des rendements, puisque le domaine est passé de 48 hl/ha en moyenne à 21 en 2016 et 28 en 2017. Mais, selon Éric Sage, tout cela devrait s'avérer payant dans deux ou trois ans, les vins gagnant en personnalité et en identité.
En passant des Garennes à la Vigne à Guiguitte ou au Grippou et quelques autres, on devine toute la richesse potentiel du domaine. Dans la plupart des parcelles, peu de manquants, même si les plus vénérables n'affichent guère plus de cinq ou sept hectolitres à l'hectare cette année, malgré de très beaux jus. Mais, quelques signes encourageants ne trompent pas, comme la réapparition massive de nombreux insectes au cours de l'été dernier, où la prolifération locale de certaines plantes que l'on destine à la production de tisanes, associées à certains traitements, comme le pissenlit ou la camomille.
Notre tour d'horizon passe ensuite par de très belles parcelles, dont certaines nous permettent justement de porter notre regard sur la mer, au-delà du village et du clocher de Brem, contribuant à proposer de beaux jus destinés à la cuvée Grand Large (assemblage AOC, chenin-chardonnay), mais aussi, non loin de là, à Bout au Vent, issue de vieilles vignes de chenin, vendangées en surmaturité, avec une bonne proportion de botrytis. Du côté des blancs donc, environ trois hectares de chenin sur plusieurs parcelles, un hectare de chardonnay, un hectare et demi de grolleau gris et 45 ares de précoce de Malingre (croisement pinot blanc/bicane), naguère assez fréquent dans le secteur de Brem, mais le plus souvent arraché et disparu de nos jours. Une variété que l'on vendange très mûr aux alentours du 25 août, au moment où les vignerons s'accordent parfois quelques vacances avant les vendanges, ceci expliquant peut-être cela... Sans doute de quoi faire une jolie cuvée originale, La Bien Nommée!...
Pour les rouges, en plus de vieilles vignes plus que centenaires de négrette, quelques arpents de cabernet franc, un peu de cabernet sauvignon, du grolleau noir, dont une très vieille vigne plantée dans le caillou, à proximité d'une carrière, qui va nécessiter des soins particuliers pour une bonne remise en état, peut-être au moyen de marcottage, des sauterelles, selon le terme employé parfois dans nos campagnes. Juste sous cette friche, une très beau coteau concave planté de gamay de 35 à 45 ans dans le bas et de pinot noir d'une quinzaine d'années dans le haut. Une terre pauvre, pleine de rhyolite, bien protégée de part et d'autre, mais ventée, face à la mer, qui donne de grands espoirs au vigneron, désireux de produire un beau pinot noir atlantique (cuvée Le Grippou).
Au cours de ces premières années, Éric Sage, qui avoue ne pas être fan des grosses extractions, va opter pour des cuvées avec une belle buvabilité et un équilibre satisfaisant, même si parfois les jus dépassent naturellement 13°. Il sera temps, plus tard, de se tourner vers quelques vins plus ambitieux, qui ne seront pas, cependant, des bêtes de concours, comme on peut le constater avec ceux en cours d'élevage en barriques (100% pinot noir et chenin). Il pratique d'ores et déjà des vinifications sans sulfites ajoutés, si ce n'est deux légers sulfitages après soutirage et à la mise en bouteilles (5 à 10 mg). Il a d'ailleurs opté pour la chambre de combustion à soufre minéral de Philippe Gourdon (générateur de soufre), le Géo Trouvetou du Puy-Notre-Dame.
Un mot également pour les rosés, couleur qui demeure emblématique en Vendée, notamment pour cause de consommation estivale sur les terrasses ensoleillées des touristes en villégiature et que le vigneron de Brem n'a pas l'intention de négliger. Le premier sur la base d'un assemblage assez classique, pinot noir, grolleau noir et un peu de gamay, le second 100% négrette, qui s'avère être un rosé de semi garde. Dans les deux cas, des vins d'une teinte assez soutenue, qui ne cèdent en rien à la mode provençale des rosés gris. A noter donc, du côté des rouges, l'assemblage à dominante de pinot noir (65%), Grand Large, composé aussi de cabernet et d'un peu de négrette. Enfin, très agréable surprise avec le second rouge, 100% Négrette, doté d'une jolie finesse et d'une expression florale des plus séduisantes, sans pour autant se contenter des arômes de violette, donnés pour être les plus typiques du cépage.
Comme on peut le voir, le Domaine La Rose St Martin, selon son identité officielle, est doté d'un très beau potentiel. Éric Sage propose déjà quelques cuvées très réussies, dans une gamme équilibrée, avec des vins sincères et droits. Pour tout dire, on est presque impatients de constater les progrès à venir, notamment s'ils s'intègrent dans une démarche de polyculture, que le vigneron ose à peine évoquer à ce jour!... Éric a indiscutablement la... sagesse de celui qui sait que les rêves, finalement, se construisent avec le temps. Après tout, il est rare de se laisser bercer, certains jours, par le bruit de la mer, au coeur de ses vignes. Un privilège que le vigneron de Brem ne manquera pas de goûter comme il se doit.
~ Laurent Pajot, à Brem sur Mer ~
Le troisième vigneron rencontré a le même âge qu'Éric Sage, son voisin (48 ans). Si l'on peut identifier quelques similitudes dans leurs parcours respectifs (ils ont été tous les deux cavistes pendant plusieurs années), il est somme toute difficile d'affirmer qu'ils sont sur des chemins identiques. Laurent Pajot est le représentant de la quatrième génération présente sur ce domaine de moins de cinq hectares. Il s'y est installé pour reprendre les vignes de son père voilà onze ans, après avoir été huit années caviste à St Gilles Croix de Vie. S'il connaît bien l'aspect commercial du monde du vin (il fut aussi représentant en vins de Bourgogne), toutes les difficultés du métier de vigneron lui sont apparues très vite, d'autant que depuis son installation, près de la moitié des domaines locaux ont disparu et que les premières années de galère ont bien failli avoir raison de son projet.
Forte personnalité, caractère marqué, autant de traits de lui-même que le vigneron de la Croix Pénard ne niera sans doute pas, même s'il n'est pas du genre à les revendiquer. "Je ne dis pas trop ce que je fais..." Pas la culture du secret pour autant, mais l'homme n'est pas disposé à se laisser dicter ce qu'il doit faire. C'est peut-être pour cela qu'il se sent plus proche de certains de ses voisins, des taiseux, qui parfois rechignent à embrasser la nouveauté. "Certains jours, ils me font sourire ceux qui viennent me dire que je ne vends pas assez cher!..."
Laurent Pajot est bien placé pour le savoir : le vignoble de Brem, mais aussi des Fiefs Vendéens, conserve une grande part d'attractivité locale et saisonnière, ce qui n'empêche pas d'avoir des visées plus larges, à l'image d'un Thierry Michon par exemple. Mais, lorsqu'on est en capacité de produire, bon an mal an, moins de vingt mille bouteilles, on se doit de s'appuyer sur le réseau que l'on a mis en place avec le temps et d'être attentif à une clientèle que l'on croise sur les marchés estivaux et aux quelques visiteurs occasionnels qui passent à la cave, avant de rentrer chez eux.
Le vigneron le dit sans fanfaronnade : il fait tout lui-même!... De la prise de décision à la vente, en passant par tous les travaux des vignes et la vinification. Et au-delà de tous les aspects pratiques et techniques, tout ce qui a trait, depuis son installation, à une transition nécessaire, permettant d'atténuer les effets d'une viticulture très conventionnelle. Même si son positionnement, à quelques égards, risquent de l'isoler quelque peu. Ainsi, il ne se voit guère, même à terme, revendiquer de label bio, pour les contraintes que cela impose (mais aussi parce que certains choix actuels ne lui permettent pas de l'obtenir), sans compter sur le fait qu'il ne revendique pas l'appellation depuis qu'elle est apparue, toutes ses cuvées étant proposées en Vin de France!... Démarche singulière s'il en est, surtout après avoir participé en son temps, comme nombre de vignerons du cru, à l'élaboration du cahier des charges validé par l'INAO. Alors, Laurent Pajot, vilain canard des Fiefs Vendéens?...
Côté vignes, une douzaine de parcelles sur 4 ha 50 au total et quelques beaux îlots : 80 ares de pinot noir âgé de vingt-cinq ans (dont une partie est dédiée à son Rosé d'Aline, 100% PN), mais aussi à son rouge Prestige, 1 ha 30 de gamay, dont une partie en gamay Beaujolais, 1 ha 20 de cabernet (mais seulement 34 ares en 2018, puisqu'une partie de celui-ci doit changer de mains), 40 ares de chardonnay, 13 ares de grolleau gris et 40 ares de chenin d'une quarantaine d'années.
Pour ce qui est des travaux en vignes, le vigneron souhaite limiter le plus possible le nombre de passages de tracteur, au point, notamment, où il répend à la main, au pied de chaque cep, de l'engrais organique. Mais, l'option la plus innovante à ses yeux, c'est qu'il expérimente depuis deux ans, grâce à un ami par ailleurs ingénieur dans le traitement des eaux, un procédé dont le but est de protéger la plante en la renforçant. Ainsi, il pulvérise, cinq ou six fois par an et à raison de 200 g/ha, de la silice ionisée photonisée. Un produit qui, selon son diffuseur, pourrait obtenir un agrément biologique dans les prochains mois, sous réserve sans doute et avant tout qu'il ne soit pas accompagné d'autres substances au cours des pulvérisations. A priori, cela permet notamment de moins perdre d'efficacité, si des pluies interviennent rapidement après traitement et, si l'on en croit les photos prises par le vigneron lors des vendanges, de garder des raisins sains jusqu'à la maturité voulue. Quelques rares essais ont lieu dans le sud de la France notamment, mais aussi dans d'autres pays (Canada, Maroc, Île Maurice...) sur diverses cultures.
Laurent Pajot propose donc trois gammes distinctes dans les trois couleurs : Bord de Mer, dans un registre plutôt léger, une série Prestige, avec notamment son Franc Blanc, 100% chenin, reprenant la dénomination ancienne et locale du cépage, mais aussi trois pétillants, dont la demande ne cesse d'augmenter, notamment pendant la période estivale, y compris pour le rouge.
Comme on peut le voir, en Vendée, l'offre reste multiple et la demande également. Si on reste admiratifs des résultats obtenus par l'élite des vignerons locaux, infatigables ambassadeurs (voir ci-dessus) d'un terroir situé quelque part entre Loire et Garonne, d'autres, plus modestes, tentent de démontrer qu'ils ont pris pleinement conscience des qualités d'une terre que les générations précédentes ont parfois négligées, souvent à leur corps défendant, parce qu'ils souffraient qu'on ne les trouva trop ambitieux. De toute évidence, qualifier de "petits vins" bon nombre de cuvées que proposent les Fiefs Vendéens, les Vins de Pays de Vendée et même les Vins de France issus de ces terroirs semble de plus en plus incongru.