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La Pipette aux quatre vins
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4 septembre 2019

Vendanges 2019 : premiers échos du vignoble

Les premiers jours de septembre ont pris une teinte quasi idéale pour les vignerons : nuits fraîches, belles journées ensoleillées, avec des températures montant graduellement jusqu'en fin d'après-midi. La météo semble stable, pas de vent et aucune précipitation ravageuse... Mais, parfois, c'est peut-être là que le bât blesse. Pour ce qui est, plus précisément, des (très) faibles précipitations enregistrées pendant cet été, ici où là. Été indien ou pas, certains vignerons vont devoir composer avec un millésime que beaucoup qualifient d'étrange... N'en doutons pas, les disparités seront de mise d'une région à l'autre!...

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Merci tout d'abord à ces vigneronnes et vignerons qui prennent le temps de répondre à mon message. Certains sont au coeur de la cueillette 2019, d'autres dans les starting-blocks, les derniers espèrent une perspective favorable, tant la météo du moment semble solide, rares sont ceux, mais il y en a certainement dans certaines contrées, qui ont terminé.

Dès le 2 septembre, c'est Hélène Thibon, du Mas de Libian, en Ardèche, qui nous communique ses impressions : "Les vendanges ont débuté le 26 août, date normale pour nous. Le gros va se couper cette semaine (36). Ce qu'il faut retenir du millésime, c'est la sécheresse, puisqu'il est tombé seulement 140 mm d'eau depuis le 1er janvier!... Les grains sont tout petits mais très sains. Belle acidité, du fait des nuits fraîches de la fin août. Encore plus fraîches ces jours-ci, ce qui laisse augurer d'une belle maturité sur les grenaches. Pour le rendement final, rendez-vous à la fin des vendanges!..."

69264660_2408421349239780_642399817535848448_nLe même jour, Guillaume Bodin, vigneron auprès de Marie-Thérèse Chappaz, à Fully, dans le Valais, nous donne une tendance quelque peu différente de celle captée dans le vignoble français : "Nous vivons une année assez compliquée en Valais avec, contrairement à nos amis français, beaucoup d’eau… Ce qui est une exception ici dans ce creux de montagne. Nous avons eu deux orages de grêle début août et mi-août, qui ont touché la moitié des parcelles à hauteur de 10-15% sur deux des trois secteurs principaux du domaine, c’est la première année depuis trente ans que Marie-Thérèse voit de la grêle sur vigne en Valais !..."

"Les vendanges s’annoncent compliquées avec des développements de pourriture par endroit, que nous avons limités manuellement avec l’équipe du domaine, la drosophile suzukii fait gentiment son apparition sur les cépages sensibles alors que nous sommes à trois semaines des vendanges mais nous gardons le moral, tout en restant constamment sur le qui-vive… Une vraie année de vigneron où il n’est pas possible de relâcher la pression". Gageons néanmoins que Guillaume trouve le temps d'évacuer quelque peu cette pression en escaladant d'ici-là les superbes voies tracées sur le granite des non moins superbes aiguilles de Chamonix!... Un vigneron qui n'a guère peur du vide, ni de la verticale!... Mais, travailler avec Marie-Thérèse, c'est tutoyer les sommets au quotidien, non?...

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Le 2 septembre également, Virginie Joly, de la Coulée de Serrant, à Savennières, faut-il le rappeler, s'inscrit dans un calendrier mobilisant les vendangeurs au cours de la deuxième quinzaine de septembre. Mais, les aspects positifs de cette phase de météo idéale en cours, ne permet pas d'évacuer les difficultés liées à la sécheresse : "2019, millésime pour le moins intéressant. Nous avons perdu environ 60% de la récolte sur nos parcelles de Savennières, et peut être 10/15% sur les parcelles de Roche-aux-Moines et Coulée de Serrant, globalement moins gélives. Un seul et unique traitement cuprique pendant la saison, du jamais vu, accompagné de 2 traitements au lait (anti mildiou et anti oïdium)!..."

"Une grosse campagne d'arrosage pour les complants par contre, la climatologie était idéale pour les maladies, mais beaucoup beaucoup moins pour la survie des jeunes et les moins jeunes ont subi aussi. Sur les deux mois d'été, un cumul de 20 mm d'eau totalement insuffisant, la situation se débloque un peu avec la rosée et heureusement les nuits fraîches désormais. Prévision de vendange entre le 15 et le 20 septembre, à affiner bien sûr."

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Le lendemain, 3 septembre, Olivier Humbrecht, du Domaine Zind-Humbrecht, présent à Turckheim et sur quelques magnifiques terroirs alsaciens, se montre plutôt optimiste : "Les vendanges s’annoncent plutôt belles en Alsace, après un épisode de fortes chaleurs au printemps et en juillet, nous avons eu des pluies salvatrices à partir de la fin juillet. Les vignes sont bien vertes et ne montrent pas de trace de stress hydrique comme en juillet."

"Les acidités sont encore hautes et la maturité avance à grand pas pour une récolte de taille moyenne à faible selon les terroirs. Le début des vendanges pour les secs est prévu le 12 septembre mais je suppose que cela commencera vraiment qu’autour du 20 septembre pour certainement s’étirer jusqu’à mi-octobre."

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Fortunes diverses!... En ce même 3 septembre, c'est ce que nous inspire le message de Laura Semeria, du Domaine de Montcy, à Cheverny, dans le Loir-et-Cher, patrie du cépage romorantin, cher à François 1er, selon la légende!... Une précédente rencontre, au printemps dernier, avait permis à la vigneronne chevernoise de faire discrètement part de sa perplexité quant aux météos printanières de ces dernières années. Des gels tardifs à répétition, de fortes chaleurs précoces, des précipitations parfois importantes... Au moment de se lancer pour les vendanges 2019, Laura ne semble pas avoir retrouvé sa pleine sérénité : "Les vendanges s’annoncent sèches. Ici il n’a pas plu depuis juin. Trois épisodes de gel durant le printemps, la sécheresse maintenant…. Un millésime très étrange... Les gamay grillent sur pieds !… Je n’avais jamais vu ça. On attend le premier pressoir (semaine prochaine) pour voir s’il y a quelque chose… De toute façon la pluie ne sera pas au rendez-vous !..."

69845882_2427912207531537_6771670087138017280_nToujours le 3 septembre, quelques nouvelles du Bordelais, avec Antonin Jamois, de l'Île Rouge, à Lugasson, du côté de l'Entre-Deux-Mers. Quelques informations précises quant à la santé du vignoble, en prévision du début de la cueillette, lors du week-end des 7 et 8 septembre : "Ici il a gelé deux fois en avril et mai. Un tiers de la récolte a donc malheureusement disparu. Il y a cependant quelques repousses sur les merlots qui permettront de conserver un peu d'acidité et de fruit s'il le fallait à l'assemblage. Cette portion de parcelle sera vendangée séparément et plus tardivement. Pour le reste la situation est meilleure, l'année s'est relativement bien passée. Le temps a été sec, probablement un peu trop et je crains d'avoir trop peu de jus. Mais le mildiou n'a pas été virulent et la vendange restante est dans une excellente situation sanitaire. Les merlots ont coulé car les conditions fraîches et humides sur la fleur n'ont pas permis une fécondation parfaite. De fait les grappes sont lâches, aérées, ce qui laisse augurer des petits rendements, mais une qualité assez exceptionnelle de la vendange, car la pourriture ne pourra que difficilement se développer."

"Les castets [NDLR : cépage ancien bordelais en cours de réintroduction dans certains domaines de la région] me posent plus de problème, la fleur plus tardive (mi-juin) s'est réalisée sur un temps sec. La fécondation est totale, les grappes sont très compactes et je crains des foyers de pourriture au sein des grappes. Je vais les surveiller de près et je ne tarderai pas trop à vendanger si le temps se dégrade. Je prévois l'année prochaine, si les conditions étaient identiques, de proscrire tout rognage sur ce cépage pour limiter la compacité des grappes."

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"Mais les conditions météo annoncées sont idéales ; un temps sec mais frais la nuit avec de grands écarts thermiques entre jour et nuit. L'acidité est belle et devrait être conservée par ce temps rêvé de maturation. Bref ici, après une année de labeur et malgré quelques aléas, j'ai beaucoup d'espoir pour ces prochaines vendanges. J'espère faire encore mieux l'année prochaine mais si je rentre tout ça, je serai déjà très heureux. Les merlots sont aujourd'hui à 12,1° potentiels et 5,45 d'AT et les castets à 10,6° et 6,3 d'AT. Je prévois, dès ce week-end, une vendange précoce sur merlot pour élaborer un pétillant et les week-ends suivants, j'étalerai les vendanges pour réaliser une cuvée en macération carbonique et une cuvée plus bordelaise à élever pour la garde."

20190822_192812En guise de conclusion de cette première salve vigneronne, en ce 4 septembre, un tour d'horizon de la situation en Champagne, avec Benoit Tarlant, à Oeuilly, fief des Champagne Tarlant. Pour illustrer ce curieux millésime, un cliché (à gauche) des raisins échaudés le 24 juillet!... Là encore, le cycle de la vigne ne s'est pas déroulé dans la plus grande sérénité : "Ici, les vendanges sont de plus en plus proches, je pense d'ici mardi prochain 10 septembre (à voir si le démarrage se fait avec toute l'équipe, ou en petit comité)."

"La saison fut épique par ici. Dans la vallée de la Marne, nous avons évité les gros gels d'avril. Seul le 5 mai nous a fait frémir de froid dans les bas de coteaux, mais sans être radical. Le printemps a commencé de manière assez humide, avec une pression mildiou et oïdium qui s'installait (ce qui ajoutait un stress pour mon équipe, depuis que l'ensemble du domaine est en conversion et plus seulement les approches parcellaires). Mais nous étions sur le pont pour faire face, avec des passages intégraux au chenillard."

"Cependant, à partir de fin juin, on est entré dans un cycle quasiment inverse, avec les différentes vagues de canicule. La première nous a aidé à contenir le mildiou, mais la deuxième (fin juillet) est devenue fatale pour les raisins exposés au soleil du sud-ouest. Un échaudage on ne peut plus brutal s'est déroulé, et les raisins sont passés de début de nouaison à sec, sans intermédiaire!... Des pertes qui oscillent entre 10% et 40% selon les lieux-dits, les expositions, les inclinaisons... Tous les raisins au levant sont restés intacts et en bonne forme, profitant de ces conditions chaudes pour aller vers la maturation avec une belle dynamique. On imaginait, vue le démarrage de la saison, une vendange de mi à fin septembre, mais l'accélération de prise de sucre nous fait réagir et anticiper un peu le démarrage. Mais on verra... C'est à présent la maturité phénolique qui va nous guider, et qui va donner l'empreinte de réussite à ce millésime."

Comme on peut le constater, les impressions, chez certains vignerons, laissent supposer, pour peu qu'on lise entre les lignes, de beaux espoirs en vue d'une production de qualité. Il est vrai que, au vu des conditions climatiques du moment, les vins dits de garde, aussi bien blancs que rouges, soutenus par une belle acidité, pourraient faire de belles bouteilles, si toutefois la maturité phénolique (anthocyanes et tanins) est atteinte, sans oublier la maturité physiologique (équilibre acidité-sucre) souvent essentielle. N'allons pas jusqu'à affirmer que les vignerons jouent à la roulette russe, mais les choix ultimes sont bien souvent une question de feeling!... A suivre!

PS : pour information, si vous souhaitez goûter aux vendanges "pour de vrai" et si vous êtes dans la région, vous pouvez passer une demi-journée au Domaine d'Anglas, à Brissac, au bord de l'Hérault. Un camping très agréable, mais aussi un domaine viticole bio, qui vous permettra de devenir un apprenti vigneron pour quelques heures!...

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