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La Pipette aux quatre vins
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La Pipette aux quatre vins
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21 août 2011

Deux talents du Saumurois : 1- Xavier Caillard, à Brézé

Si l'appellation Saumur-Champigny offre la possibilité de découvrir une série de domaines ayant atteint un niveau de reconnaissance certain, mais aussi l'éclosion de quelques jeunes talents, sa grande soeur, Saumur, souffre d'une sorte de déficit de notoriété, du moins pour les vins rouges, puisque tous les blancs secs de la région sont en AOC Saumur. Certes, dix-sept communes bénéficient de l'appellation Saumur-Puy-Notre-Dame, mais cette dernière se fait pour le moment assez discrète.

La discrétion, c'est un peu aussi ce qui caractérise les deux vignerons du Saumurois, rencontrés à l'occasion de cette escapade ligérienne. De Brézé à Brossay, voici deux talents attachés à leurs vignes et à leurs terroirs, mais aussi à une approche personnelle du métier et à la fidélité à la méthode adoptée. Non qu'ils soient figés dans de grands principes, loin s'en faut, mais en tout cas, pas prêts à se laisser dicter de quelconques modes de production de supposés grands vins. D'ailleurs, avec le recul de quelques années, leur ouverture vers d'autres techniques, leur volonté de se tourner vers le futur, ils seraient à même de démontrer à certains, à quel point ils continuent d'avancer. Rencontre donc, en deux chroniques successives, avec deux vignerons qui n'ont pas fini de nous étonner, Xavier Caillard, à Brézé et Guillaume Pire, au Château de Fosse Sèche!...

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~ Xavier Caillard, à Brézé ~

Le Château de Brézé est là, derrière ce haut mûr, de l'autre côté de la rue. Les visiteurs sont nombreux, chaque année, à se presser, à l'invitation de Sylvie Augereau, maîtresse de cérémonie lors de la Dive Bouteille, dans les douves et coursives taillées dans la pierre de tuffeau. Les vignerons également viennent alors de toute la France et même de Navarre. Savent-ils tous bien, les uns et les autres, que tout prêt de là, séjournent quelques-uns des plus grands vins du Saumurois?... Rendez-vous aux Jardins Esméraldins!...

Xavier  Caillard n'est pas seulement un "facteur de vin", adoptant des choix, des techniques immuables, mais quelqu'un qui inscrit son "art" dans une observation permanente et une réflexion profonde. S'il n'a jamais perdu de vue la phrase d'Hippocrate, chère aux médecins - "D'abord, ne pas nuire" - la décennie au cours de laquelle il vient d'accumuler une expérience que l'on peut qualifier d'irremplaçable, l'a conduit à un carrefour qui le pousse à aller encore plus loin. Il l'annonce d'ailleurs dans son courrier millésimé 2010 : "L'expérience des années écoulées et l'avancée de mes recherches sur l'art du paysan-vigneron vont me conduire à modifier profondément les Jardins Esméraldins."

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Dans les dernières années du XXè siècle, Xavier fait des études en Fac de Biologie, à Bordeaux, avec l'idée de faire de la recherche. Il s'interroge assez vite sur l'orientation qu'il pourra donner à sa vie de scientifique. Parallèlement, son intérêt pour le vin est devenu croissant. Au sortir de vendanges chez Mark Angeli, il retourne à Bordeaux, non sans s'interroger sur sa présence au bord de la Garonne, mais finit son cursus, en se motivant en partie, par le fait d'avoir pris une option "science de la vigne", lors de son année de licence.

A cette époque, il sait pouvoir disposer de la maison de ses grands-parents à Brézé et de la cave souterraine, typique de la région et fort intéressante. Lors de rencontres successives avec Mark Angeli, ce dernier le rassure sur la possibilité de s'installer sans trop d'investissements. La création du domaine se dessine peu à peu.

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Côté vignes, il peut disposer de quelques petits îlots, çà et là. A Migron tout d'abord, petit hameau à l'écart de Montreuil-Bellay, des parcelles plantées depuis une quarantaine d'années, dans une logique très couleur locale "de consommation courante". En premier lieu, Les Chauffeaux, 60 ares de chenin sur un mélange d'argile, de cailloux et de graviers, mais dans un secteur déclassé, sur les terrasses anciennes du Thouët, pour cause de tendance à l'hydromorphie!... Pas une sinécure!... Un vrai défi que cette parcelle plutôt difficile à gérer, même si un mieux est à noter depuis quatre ou cinq ans, notamment du fait d'un sévère contrôle de la vigueur par enherbement. Les jus ici, apportent plutôt de la rondeur et du fruité.

Non loin de là, La Gravelle, soit 20 ares de sables argileux et cinq rangs de chenin, cinq de gamay et trois de cabernet franc, de vignes plutôt vigoureuses. Les rouges sont ici fins et fruités. Le chenin exprimant minéralité et verticalité.

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A Brézé, deux secteurs, dont vingt ares de cabernet franc de 70 ans (Bourguenne), sur des sables et argilo-calcaires du Turonien moyen et d'autre part, cinquante ares de chenin plus jeunes et cinquante de cabernet franc (Les Esméraldines), dans le bas de la croupe (versant est) du Château de Brézé. Un très beau terroir de sable et d'argile sur un socle de tuffeau du Turonien moyen, qui superpose de la craie blanche du Turonien inférieur. Problème pour ce secteur, sa sensibilité avérée au gel de printemps. Néanmoins, Xavier dispose là de près de trois hectares et devrait planter 50 ares de chenin en 2012, dans le but de travailler à terme avec un cheval, ce dernier disposant également d'un espace de prairie.

Parmi les nouvelles orientations du domaine donc, la volonté de rapprocher la vigne de la maison, ce qui implique qu'une partie des 2,20 ha actuels doivent "migrer" sur la commune de Brézé. Pas une mince affaire, dans la mesure où Xavier ne dispose pas de droits de plantation et qu'il doit donc arracher sur Migron, avant de créer son nouveau plantier. Brézé se révèle être désormais un secteur très convoité en AOC Saumur pour les blancs secs et Coteaux de Saumur pour les moelleux. Et lorsqu'on sait que des domaines réputés comme Foucault et Guiberteau possèdent quelques arpents plus haut dans le coteau, on comprend aisément pourquoi il est souvent difficile d'avoir connaissance, en temps voulu, des parcelles qui se libèrent...

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La date est gravée dans la pierre du fronton de la porte de la cave : 1760!... Mon esprit s'évade en pensant à tous ces "grands crus" identifiés depuis des siècles, dont certains, de nos jours, ne méritent pas qu'on s'y attarde, quoiqu'en disent les vignerons, qui les vantent et les pratiquent!... Alors même que depuis 1999, son premier millésime, Xavier Caillard propose quelques nectars souvent issus de vignes de "consommation courante"!... Et l'on se rappelle alors la devise du vigneron reprenant la maxime de Kakuzô Okakura : "Le passé contemplerait sans doute avec pitié la pauvreté de notre civilisation; l'avenir rira de la stérilité de notre art. Nous sommes en train de détruire l'art en détruisant le beau au coeur de la vie."

Jusqu'à aujourd'hui, le mode de vinification et d'élevage n'a guère évolué, du moins jusqu'au millésime 2009. Le passage en fûts (pour les rouges, des barriques de 228 litres et pour les blancs, des demi-muids de 400 litres) se faisait rapidement et la durée de l'élevage, en fûts et en bouteille, variait selon le millésime.  Ainsi, Genèse blanc 1999 a passé cinq années en fûts et six en bouteilles, alors que Genèse blanc 2000 n'est disponible qu'après neuf ans de barriques et un an en bouteilles. Les millésimes 2001 et 2002 sont également sortis en blanc (pur chenin, pour mémoire), alors qu'en rouge (gamay et cabernet franc), seuls Genèse rouge 2003 et Genèse rouge 2004 sont disponibles.

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Là, dans cette fraîcheur et cette semi-obscurité, pipette et verres en mains, la curiosité est forte et l'on se sent prêt à découvrir ces millésimes du futur de Genèse blanc : 2004, 2005, 2006 (qui pourrait bientôt être mis en bouteilles, mais chut...), 2007, 2008 et 2009 (que l'on n'est pas près de voir en flacons!...) et 2010, qui va sans doute marquer un virage important pour les Jardins Esméraldins. Si au cours des années les plus récentes, la proportion de jus issus des vignes de Brézé a augmenté (ce qui est déjà un point très important), ce sont plutôt les circonstances et des impressions plutôt nouvelles qui attisent la réflexion du vigneron. En fait, le millésime 2010 a failli disparaître, purement et simplement, lors 03082011 018d'un séisme pour lequel l'échelle de Richter ne pouvait nous informer en rien!... Une des salles souterraines dans laquelle il reposait menaçant de s'écrouler, il a fallu agir en conséquence. Le vin a donc été transféré d'urgence dans des cuves inox de 10 hl, ce qui, pour les prémices de l'élevage, le place dans des conditions très différentes de ses aînés.

Lorsque nous dégustons celui-ci, prélevé sur l'une des ces cuves, Xavier Caillard (qui n'est pas homme à se livrer, craignant parfois, quelque interprétation excessive) laisse entendre qu'il trouve cette expérience fortuite très enrichissante. Les divers changements annoncés ne sont pas loin de prendre forme : travailler sur de plus grands volumes et sans doute, adopter le béton pour les élevages. Si les cuves ovoïdes ne manquent pas de l'interpeller, il se voit plutôt en construire aux dimensions "sur mesure", soit en béton donc, soit en terre cuite, sous réserve de trouver les bons matériaux.

En attendant, ce 2010 est d'une superbe dynamique, tendu et rectiligne à souhait, doté, de plus, d'une persistance assez remarquable. On retrouve déjà la finale saline, dans la plus pure expression des vins du domaines. Prélevé sur fût auparavant, le 2006 (jamais soutiré!) se montre un peu sur l'élevage, mais03082011 019 surtout doté d'une étonnante touche tannique, due au pressurage très lent et d'une salinité qui modèle une fin de bouche voluptueuse et une rétro-olfaction savoureuse et goûteuse. Il sera bientôt en bouteilles (mais pas forcément aussitôt disponible!), pour peu que l'une des barriques finissent de fermenter!...

Avant de remonter à la surface, afin d'apprécier la cuisine de Muriel, découverte d'un petit lot millésimé 2000, toujours en cours d'élevage. En fait, un chenin liquoreux issu de raisins botrytisés, à la palette aromatique assez stupéfiante - des notes de vieux rhum! - et doté d'une puissance extravagante!...

Alors, bien sûr, Xavier Caillard se fait rare. A peine peut-on le rencontrer lors de Renaissance des Appellations, à Angers, fin janvier. Au printemps dernier, il était aussi présent dans un petit salon, à Paris et il a pu mesurer ce qu'il génère avec ses "Genèse"!... De la curiosité certes, mais aussi une certaine admiration de la part des passionnés de toutes origines. Quelques importateurs sont devenus de véritables aficionados de ces cuvées d'exception, qui expriment la force d'un héritage, la communion avec la terre et, plus largement avec l'environnement et tout l'attachement à un savoir-faire, qu'il faut avoir l'humilité de réapprendre et de moduler. Et ça, le vigneron de Brézé le fait en toute sincérité!... Sur les chemins qui mènent au sommet de son Art!... 

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Commentaires
P
... c'est peut-être, le qualificatif qui convient le mieux à Xavier Caillard!... Mais, pas seulement pour ses cuvées. Son installation, en 1999, intégrait sans doute l'idée de fonctionner hors "circuit consumériste classique". Ne pas solliciter les banques, ou si peu et orienter ses choix pour garder un vrai libre arbitre. Travailler sur la durée, sans l'arrière-pensée du "tout, tout de suite" ou du "vous allez voir ce que vous allez voir!..."
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J
lors d'une horizontale de cabernet franc ligerien 2003, les Jardins d'Esmeralda Rouge etait sorti unanimement devant tous et pourtant tout les cadors connus etaient presents (Foucault, Baudry, Amirault, Alliet, Guiberteau, ...) <br /> et tous ne pouvions imaginer que ce fut un cabernet, on pensait tous à un pirate de pinot noir et on trouvait le jeu trop facile!<br /> la claque en devoilant les etiquettes!!!!!!!!!!!<br /> reste la disponibilité des quilles, pas evident d'en trouver et les prix peuvent etre dissuasifs mais eut egard au travail, pas tant que ca...<br /> je me suis d'ailleurs toujours demander comment il pouvait vivre de son metier ou de sa passion??<br /> jull
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