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La Pipette aux quatre vins
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La Pipette aux quatre vins
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25 janvier 2014

Jo Landron, Sèvre Nantaise rive droite

Voilà à peine quelques années, le Muscadet, fut-il de Sèvre et Maine, ne connaissait qu'une approche globalisée. Rien de péjoratif là-dedans, mais force est de constater que les volumes traités parfois par le "grand négoce" local ne laissaient guère de place à une autre voie. Bien sur, certains tentèrent de s'engager vers une autre alternative, mais de telles initiatives, comme la dynamique Métaireau (rentrant du Maroc) des années 70 et 80, ne réussirent pas tout à fait à contrebalancer la tendance dominante et depuis, un "monstre" impose toujours sa loi et sa logique économique que d'aucuns qualifient pourtant de curieuse.

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Au Domaine de la Louvetrie, Jo Landron est bien armé pour évoquer avec ses visiteurs, tout ce qui compose le paysage du Muscadet et cela, avant même d'aborder le sujet passionnant des terroirs. En effet, le domaine familial est apparu dans le secteur de Bellevue, sommet du vignoble, au lendemain de la dernière guerre, la plantation des vignes intervenant entre 1946 et 1948. Lorsque, quelques années plus tard, en 1967, son père Pierre et son oncle se séparent, Pierre se lance dans la construction de la cave et d'un équipement à la pointe du progrès de l'époque. Déjà, le petit Joseph sait ce qu'il veut et du haut de ses neuf ans, il fait part au chef de famille qu'il est intéressé par la terre.

Mais, il faut bien, pour cela, faire quelques études et lorsqu'il revient au bercail en 1979, son père dispose de treize à quatorze hectares. Trop peu pour deux. Jo achète alors une partie de neuf hectares d'une propriété voisine et se lance. "La vie est faite de hasards et d'opportunités..." Très vite, il commence à inventorier les terroirs. Une démarche nouvelle à l'époque, même si la mémoire des uns et des autres, notamment des plus anciens du pays, contient bien la trace de tous les endroits "où on fait bon!..."

Nous ne sommes néanmoins pas en Bourgogne et certains aspects, tels que la mise en bouteilles au domaine, par exemple, sont encore rares. Pourtant, un secteur comme le Fief du Breil est mis à part dès le début des années 80, pour son expression originale, histoire de créer une "Cuvée Prestige", comme c'était parfois la mode à l'époque.

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C'est alors que le marché s'anime et connaît quelques valses-hésitations et/ou retournements. Métaireau a imposé sa patte en induisant quelques initiatives qualitatives, mais en 1982 ou 1983, Anglais et Américains font pencher la balance vers un nouveau style de vins à la personnalité plus marquée, comme ceux des Landron, s'appuyant sur une notion nouvelle de terroirs. Sur cette base et fort de ces premiers succès, Jo construit sa gamme jusqu'en 1990. Mais, 1991, son gel printanier dévastateur et son marasme, bouleverse la donne et casse les quelques certitudes acquises. Heureusement, au cours des quelques années précédentes, si les parts de marché ont chuté dans le reste du vignoble, vers le Royaume-Uni et les États-Unis notamment, le scandale des vins autrichiens (et allemands) de 1985 va être un véritable appel d'air pour les vins blancs secs du Pays Nantais, nouveau marché sur lequel Jo Landron est déjà bien positionné. Autant d'expériences qui n'installent pas les viticulteurs du cru dans une sécurité illusoire. Indiscutablement, un vigneron nantais averti en vaut deux!... Et la famille Landron ne risque pas de perdre cela de vue.

Aujourd'hui, les Domaines Landron, c'est près de cinquante hectares, auxquels il faut désormais en soustraire presque sept, que Jo cède à son fils Manuel et à Marion, qui viennent de s'installer et ce, dans trois secteurs différents, histoire que la plus jeune génération montre ce qu'elle perçoit et restitue de ces fameux terroirs du Muscadet. En amont, Jo Landron a oeuvré pour qu'un regroupement de parcelles soit possible, à coup d'échanges ou de reprises de vignes sans repreneur, voire de friches. Ainsi, autour de la cave, un îlot d'une douzaine d'hectares est désormais d'un seul tenant. Ces regroupements par îlots géographiques, par nature géologique et par lieux-dits se sont poursuivis jusqu'il y a quatre ans. Il faut dire que l'aspect économique les a aussi rendus plus aisés, puisque le prix à l'hectare de vigne a été divisé par quatre depuis 1990.

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Dans ce secteur, nous sommes sur une sorte de plateau qui ondule. Sur un carré à proximité de la route qui mène à Clisson, nous trouvons là ce qui compose une bonne partie de la fameuse cuvée Amphibolite, issue de micro terroirs et fer de lance du domaine, au point d'en être le porte-étendard. C'est en 1993 que cette sélection parcellaire a vu le jour, sur une base de vignes âgées de trente à cinquante ans. Ces dernières sont en effet parsemées de pierres vert foncé, voire noires, issues de cette veine d'amphibolite (une roche métamorphique, roche ayant subi une transformation minéralogique et structurale, suite à l'élévation de la température et de la pression) qui serpente dans le sous-sol, s'approchant de la surface dans certains endroits et s'enfonçant à peine quelques kilomètres plus loin. A certains endroits, il n'y a guère plus de 20 cm de sol sur la roche et, à y regarder de plus près, cette veine ne fait pas plus de cent cinquante mètres de large, le plus souvent.

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Non loin de là, près de l'ancienne Maison des terroirs, se situe une butte d'argile ayant reçu des roches métamorphiques, à une époque où se succédaient périodes glacières et chaudes, voire éruptives. Cette argile additionnée de grès, de petits galets et sédiments éoliens dans la partie haute (Mortier Gobin) est retenue par une sorte de muraille d'orthogneiss qui la sépare d'une zone de sables dans le bas (Les Houx). Par ici, un sol chaud sur un sous-sol froid, donnant une franche originalité aux vins du secteur, au point qu'une démarche de Cru communal est en cours, dans la zone dite de Vertou-La Haye Fouassière. A noter, plus bas dans la pente, quelques vignes centenaires dominant le coteau qui surplombe la rivière, où les plus anciens du pays soutiennent qu'il y avait là, jadis, des vignes en terrasses.

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Nous atteignons ensuite une partie du vignoble située dans une zone de la commune où l'on trouve un meilleur équilibre paysager, du fait d'une polyculture survivante (deux agriculteurs seulement disposant encore de troupeaux de vaches sur la commune!...). Une situation et une proximité recherchées, le plus souvent, dans l'optique d'une pratique cohérente de la biodynamie, méthode adoptée au domaine, pour des premiers pas dès 2004, de façon pragmatique cependant et généralisée en 2008, la certification ayant été obtenue en 2011. La petite route nous conduit au Fief du Breil, contigu à la propriété du château éponyme datant du XIXè siècle. Ici, c'est l'orthogneiss qui domine largement, au point d'être la composante principale du sous-sol et d'apparaître largement à la surface. Un superbe double coteau, aux deux expositions opposées, d'environ sept ou huit hectares, pour lequel il ne reste guère plus de trois exploitants, dont un ne dispose plus que de cinq ou dix ares, le tout penchant vers la Sèvre Nantaise. Là aussi, le fils Landron va pouvoir s'exprimer. A la limite, les Landron pourraient être en situation de monopole, mais c'est une idée à laquelle Jo n'est pas attaché, préférant la diversité, surtout lorsqu'on défend la notion de cru.

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Pour être absolument exhaustifs (mais nous manquons de temps et d'autres visiteurs nous attendent à la cave!), il faudrait aussi traverser la commune pour rejoindre le Château de la Carizière. Un ensemble de neuf hectares, dont Jo vient de céder trois hectares, ne gardant que le Clos ceint de vieux mûrs. Là encore, de l'orthogneiss et un sol silico-argileux, donnant des vins plutôt tendres et fruités.

Avec plus de quarante hectares et une démarche mettant en valeur les terroirs, le passage à la cave ouvre de multiples horizons. Globalement, il faut noter que les jus du millésime 2013 sont très intéressants et le vigneron ne cache pas qu'il a bon espoir de proposer de très jolies cuvées au final. De plus, les cuvées en bouteilles disponibles ne manquent pas de caractère, ni d'originalité, comme Amphibolite 2011, Haute Tradition 2010, tendu et expressif, sans oublier Melonix, le melon de Bourgogne résolument nature. A table, quelques jours plus tard, l'association d'un parmentier de lieu jaune aux herbes et un Fief du Breil 2007, laisse entrevoir à quel point le Muscadet possède toutes les qualités pour répondre à la belle gastronomie. S'il était encore permis d'en douter!...

Jo Landron a depuis quelques temps déjà un statut de référent en Pays Nantais. Un regard qui pétille et une moustache qui frétille ont sans doute aussi contribué à forger son image, au-delà de ses cuvées gourmandes. Mais, ne vous y trompez pas, le détour par les Brandières, à La Haye Fouassière, vaut le coup, parce que quelques petits trésors sont à découvrir au sommet du vignoble nantais.

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